Les nuisances olfactives
Autrefois désertés, les terrains qui bordaient usines, voire centres de traitement des déchets sont aujourd'hui réinvestis. Avec des nuisances olfactives à prendre en compte.

Les nuisances olfactives

Vivre à proximité d’un centre de traitement : un danger olfactif ?

Pas facile de parler bien-être et d'écologie lorsque son habitation se situe à proximité immédiate d’une zone industrielle. Outre la pollution et l’impact à long-terme sur l’environnement, les riverains sont confrontés à un certain nombre de gênes sensorielles identifiables : bruit, odeurs pestilentielles, etc. Tout comme leurs consœurs acoustiques, les nuisances olfactives participent à la dégradation de l’état de santé, celui-ci ne pouvant se réduire à une absence de pathologie (source : OMS). Ainsi, sur les 20 000 litres d’air qui passent chaque jour par le nez, certains seront porteurs de bonnes ou mauvaises odeurs. Les neurones olfactifs sont en effet chargés de la transmission de l’information au cerveau, expérience qui sera parfois bien désagréable. Vittorio Bizzozero, docteur en neurosciences, a pu étudier l’odorat au cours de ses recherches. Pour lui, sentir « est notre façon d’être directement connecté au monde ». Mais en plus des odeurs – bonnes ou mauvaises – que nous sommes conscients de percevoir, il existerait tout une palette d’odeurs en arrière-plan de notre perception ; des odeurs quasi-subliminales « qui nous touchent à notre insu » et n’en sont pas moins importantes. Ainsi, une personne travaillant dans une décharge ou vivant à proximité d’un centre de traitement finira par être subjectivement moins sensible à la mauvaise odeur du lieu : l’on parle alors d’habituation. Cependant, l’odeur continuera d’avoir un impact à long terme sur la santé ou encore l’humeur de la personne. C’est pourquoi il convient de gérer mais aussi d’informer sur les répercussions que peuvent avoir les mauvaises odeurs.

Reconnaître la nuisance et ouvrir le dialogue

Les nuisances olfactives, qu’elles soient provoquées par un particulier ou un organisme, font partie des troubles du voisinage répertoriés par la Direction de l'information légale et administrative pouvant conduire à des sanctions comme, par exemple, la suspension de l’activité responsable de ces nuisances. Cependant, rendre compte du phénomène subjectif qu’est la perception d’une odeur afin de la décrire de manière neutre et objective est problématique et nécessite une formation spécifique dont ne disposent pas la majorité des agents municipaux et autres huissiers. C’est pourquoi, certaines sociétés susceptibles de produire de « mauvaises odeurs » optent pour la prévention, en créant, par exemple, une plateforme de signalement en temps réel des nuisances en partenariat avec les associations de riverains.

Zoom sur les éco-animateurs, un métier d’avenir

Afin d’identifier ces nuisances, des professionnels – hommes et femmes de terrain – sont formés aux enjeux de la perception olfactive. Ces éco-animateurs – ou nez – que l’on retrouve également dans l’industrie agroalimentaire procèdent au contrôle des zones concernées pour y recenser les odeurs perceptibles selon une échelle d’intensité allant de 1 à 5. Ces professionnels de l’odorat ont été spécialement formés à l’analyse sensorielle appliquée. Un métier exigeant qui requiert un sens aiguisé, de l’attention et une discipline stricte : boire autre chose que de l’eau, manger ou encore se parfumer sont à bannir durant les heures de travail. Le centre de valorisation des déchets d’Aulnay-sous-Bois, géré par le Syctom (agence métropolitaine des déchets ménagers) a ainsi mis en place un système de pulvérisation de produit neutralisant les odeurs à des endroits-clefs (quais, zone de chargements…) permettant ainsi une cohabitation rassérénée entre usine et riverains.

La Recherche a du nez

Si l’intervention d’architectes-urbanistes suffit pour intégrer un site industriel au paysage environnant, de même que les nuisances sonores sont facilement mesurables en décibels, les nuisances olfactives demandent une coordination à plusieurs niveaux : chimie, neurosciences, sociologie, psychologie… pour aller au-delà d’une perception d’abord subjective. Ainsi, Les méthodes de neuro-imagerie développées à partir des années 1990 permettent une meilleure connaissance de l’olfaction, un pied de nez à tous ceux qui pensaient qu’il s’agissait d’un sens de second ordre. Ces dernières décennies ont été marquées par des travaux de Recherche et Développement qui permettent dorénavant aux grands groupes industriels d’intervenir en amont comme en aval des nuisances. À ce titre, Suez Environnement de créer NOSE (No Odor for Suez Environnement) qui, comme son nom l’indique, propose un certain nombre de solutions innovantes quant à la gestion des mauvaises odeurs. Veolia, via sa filiale dédiée OTV développe un « nez » électronique OdoWatch® , inauguré en 2005. S’il sait distinguer à ce jour de nombreuses odeurs, nous sommes encore loin de la sensibilité d’un nez humain, lui-même à la traîne par rapport à d’autres espèces comme le chien dont l’odorat est un million de fois plus sensible.

En savoir plus:

- Sur l’odorologie canine, http://sciences-en-ligne.net/news/item/174
- Sur les solutions proposées par OTV, http://www.otv.fr/fr/expertise/municipalites/traitement-odeurs/
Sur le traitement des nuisances olfactives en Chine, https://www.veoliawatertechnologies.com/fr/medias/medias/publications/el...
- Sur l’action du Syctom en matières de nuisances olfactives, https://www.syctom-paris.fr/stockage-des-enregistrements/faq/valorisatio...